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La Marilengue

uitspraak la marilengue voorbeeld La musique, je la dédie surtout à mon pays, aux gens de ma région. C'est un peu par attachement maternel. C'est un peu la mère-langue. Nous on dit la marilengue, la langue mère. uitleg Chez nous, au Frioul, on dit la mère-langue, la marilengue. On a l'impression qu'elle s'en va et elle va s'en aller comme beaucoup d'autres. Tous les ans, il y a je ne sais combien de langues qui disparaissent dans le monde. Et la nôtre va disparaître également. Mais j'y suis tellement attaché. Je me suis dit que s'il en reste un, eh bien, je serais celui-là. Je suis un peu le dernier des Friouliens comme le dernier des Mohicans. commentaar Moi je suis grandie en ne parlant qu'italien, mais ma grand-mère parlait le dialecte de ma ville, et un dialecte très éloigné de l'italien. Et c'est ça que j'ai trouvé intéressant dans les mots qui sont dans le dictionnaire, et notamment la marilengue. commentaar J'adorais ce mot parce que d'abord c'est très poétique, ça évoque une dame, une femme, quelque chose d'exotique, de musicale, mais effectivement en italien on dit la mère-langue, ce n'est pas seulement la langue de la mère, mais c'est aussi la langue qui est le plus utilisée dans un environnement spécifique. Je me demandais c'est quoi la mère-langue de schaerbeek, et en fait ça peut être cette langue qui est si mélangée, comme elle apparaît dans le dictionnaire. creatie "Il est arrivé avant-hier. Avant hier ?
Là. 
Il a traversé des pays qui parlent des langues qu’il n’a pas compris. Lui, il a continué à parler sa langue, celle de sa mère, celle de son père et celle de ceux d’avant eux. 
Ici, pour demander de l’eau ou un lit, il a appris un geste, un morceau de mot, un truc vite fait, utile, pratique. Il est arrivé. Évidemment, il y a toujours une période d’adaptation. Ici. Mais là, ça va très vite pour lui. Il voit bien que s’il ne rencontre personne de sa source, de son eau, il s’asséchera, il vrillera. Il traverse des rues, en écoutant les gens qui traversent avec lui, ou qui sont arrêtés au feu rouge. Il entend bien s’il reconnaît des sons, parfois, il croit et puis pas. Souvent, les gens sont fermés ou ils sont dans leur vie, aucune parole n’émerge, ne filtre, ne jaillit. 
Il a bien pensé leur demander son chemin, mais vu qu’il ne sait pas où il va… Deux jours déjà. Deux jours ?
Il a débuté une sorte de journal, sur du papier journal. Il place ici et là les mots qu’il connaît au milieu de ceux qu’il ne connaît pas. Ça lui fait une trace. Il pense que s’il ne trouve pas rapidement quelqu’un qui le comprend, qu’il comprend, il perdra l’usage de sa voix. Ce n’est pas tant le silence qui l’angoisse mais l’absence. L’absence. L’absence de sa gorge, l’absence de sa trachée, l’absence de son ventre, l’absence de ses entrailles. Où est sa voix ?
Alors, il répète les chansons enfantines, une ou deux ritournelles avec des trous dedans, il chuchote des nouvelles de la télé qu’il a retenues, et des bribes des paroles des sages qu’on lui a offert quand il a dit qu’il partait, de là-bas. Ça fait une litanie, une forme de prière qu’il nourrit de toutes les voix différentes. Ces voix qui l’occupent, qui le coupent. Il parle à voix haute, il s’entend, ça lui fait de la compagnie. Pourvu que bientôt quelqu’un parle comme lui, avec lui. Pourvu qu’à un moment, il ne croit pas qu’il est le seul ; qu’il est le seul, qu’il est le seul et qu’en plus, il est le seul fou." Milady Renoir – janvier 2012 - Mise en ondes Daniel Martin-Borret